Ecrire pour les adultes, écrire pour les enfants : continuités, ruptures, spécificités


Colloque organisé par l’IHRIM (UMR 5317) et PRALIJE-ESPE

Comité d’organisation :
Marion MAS (Université Lyon 1, IHRIM, PRALIJE), Anne-Marie MERCIER (Université Lyon 1, IHRIM, PRALIJE)
Nedjima KACIDEM (Gestionnaire IHRIM)

Institutions
ESPE de l’Académie de Lyon, Université Lyon1, IHRIM - UMR 5317

Contacts
marion.mas univ-lyon1.fr
anne-marie.mercier univ-lyon1.fr

Les propositions de communications devront être envoyées sous la forme d’un texte bref (200 à 500 mots), accompagné d’un CV, avant le 30 janvier 2018 à Anne-Marie Mercier et Marion Mas .


Les tentatives pour définir ce qu’est la littérature « de » jeunesse ou la littérature « pour » la jeunesse se sont heurtées à de multiples difficultés, difficultés qui ont fait conclure parfois à l’inexistence ou à l’impossibilité de cette littérature (J. Rose [1]), à moins de la placer dans un « paradoxe insoluble » (Virginie Douglas [2]). Lorsque Sandra Beckett a publié De Grands Romanciers écrivent pour les enfants (P.U. de Montréal, 1997), c’était avec l’idée que son étude pourrait servir à montrer à travers quels choix ce secteur de la littérature s’est constitué. Elle y analyse aussi bien des textes écrits pour des enfants que d’autres qui n’avaient pas a priori cette destination.
Ainsi, les écrivains eux-mêmes peuvent hésiter sur les façons de caractériser leurs écrits destinés à un public plus jeune. On voit par exemple Michel Tournier (cité par Sandra Beckett) nier toute spécificité à la littérature pour la jeunesse : « … mes livres ne relèvent pas de la littérature pour les enfants, même quand ils sont lus par les enfants » ou au contraire, alors qu’il affirme juger « la valeur d’un livre inversement d’après l’âge de ses lecteurs », trouver son « petit Vendredi […] meilleur que le grand c’est-à-dire plus achevé, plus serré, beaucoup moins philosophique, beaucoup moins abstrait et tout aussi riche ». Pour C. S. Lewis [3], l’écriture pour la jeunesse modifie ses habitudes et impose des contraintes, « une stricte limitation en matière de vocabulaire », interdit « l’érotisme », réduit « les passages de réflexion ou d’analyse », incite « à produire des chapitres de longueur presque égale, pour convenir à la lecture à voix haute ». Mais « toutes ces restrictions, ajoute-t-il, [lui] font beaucoup de bien, un peu comme d’écrire en vers ». On peut également penser à la fameuse déclaration de Philip Pullman lors de son discours de réception de la Carnegie Medal (« There are some themes, some subjects, too large for adult fiction ; they can only be dealt with adequately in a children’s book »)

Faute de définir exclusivement la littérature pour la jeunesse par son public, trop insaisissable, ou par son « lecteur implicite » qui n’est qu’une construction de l’auteur ou de l’éditeur, on peut tenter de voir comment certains écrivains investissent ce champ en infléchissant leur écriture ou en choisissant des thèmes ou des personnages qui leur ont semblés propres à intéresser de jeunes lecteurs.
On se proposera dans cette journée d’étude de poursuivre cette exploration en examinant les constantes et les différences que l’on peut observer dans les oeuvres d’auteurs qui ont écrit explicitement tantôt pour les enfants tantôt pour les adultes, en cherchant en quoi le lecteur visé modifie (ou non) leur écriture et leurs choix, quel est le lecteur implicite que leur texte construit, en quoi le lecteur inscrit diffère selon qu’il est supposé être enfant ou non.
En faisant porter cette réflexion aussi bien sur roman que sur le théâtre et la poésie, on s’interrogera sur les constantes et sur les variations observables d’un public à l’autre pour un même auteur, pour une même auteure. La réflexion concernera aussi bien :

  • le plan thématique (permanence on non des thèmes d’un livre à l’autre, souci d’adaptation, atténuations visant à protéger la sensibilité des lecteurs/lectrices ou au contraire accentuations pour rendre plus explicites des sentiments, des jugements de valeurs, des actions…),
  • le plan narratologique et stylistique (longueur des textes et des chapitres, rythme, choix des mots et de la syntaxe, complexité des intrigues et du personnel des personnages, de l’espace et du temps, place de l’implicite…), jeux avec la chronologie ou l’énonciation, etc.

Notes

[1The Case of Peter Pan, or the Impossibility of Children’s Fiction, Basingstoke, Macmillan, 1984.

[2« Comment définir la littérature de jeunesse ou le paradoxe insoluble », in Isabelle Cani, Nelly Chabrol Gagne, Catherine d’Humières, Devenir adulte et rester enfant ? Relire les productions pour la jeunesse, Presses Universitaires Blaise Pascal, Clermont Ferrand, 2008, p. 105-117.

[3Cité par Sandra Beckett.