Jollène MOUSSAVOU « Spinoza et Jonas : Comment penser une éthique pour la vie par temps de crise environnementale ? »

Le jury est composé de :
Delphine ANTOINE-MAHUT (ENS de Lyon), examinatrice
Mogens LAERKE (CNRS, ENS de Lyon), directeur
Jacqueline LAGRÉE (Université Rennes I), rapporteure
Sonja LAVAERT (Vrije Universiteit Brussel), rapporteure
Pierre-François MOREAU, (ENS de Lyon), examinateur

Résumé
Qu’est-ce qui devrait animer l’homme pour agir et réfléchir dans un combat pour la préservation de la nature et l’avenir des générations futures ? La crise environnementale est la crise humaine la plus violente, inédite tant par l’ampleur de ses effets que par l’objet qu’elle menace. L’enjeu de la réflexion éthique ainsi suscitée concerne non pas le sort réservé à tel ou à tel groupe humain particulier, mais celui de l’humanité entière. L’éthique environnementale réfléchit à l’élaboration des valeurs qui peuvent préserver la biosphère pour la continuité de l’humanité, menacée en outre par les biotechnologies.
Pourtant le registre apocalyptique qui imprègne la pensée de Hans Jonas semble oublier que l’homme est une unité psycho-physique. L’analyse psychologique des affects, telle qu’on la comprend à partir de la théorie de l’imagination chez Spinoza, établit le rapport entre l’imagination et la santé de l’âme, ainsi qu’entre la santé de l’âme et celle du corps. D’où l’exhortation spinozienne à cultiver ou à rechercher les affects joyeux. Car notre désir de vivre dépend tout entier de la qualité des affects qui nous traversent, et notre santé aussi bien psychologique que physique n’en demeure pas moins liée à notre état affectif. Dans cette mesure, l’ « heuristique de la peur » de Jonas ne serait-elle pas nocive pour la qualité de vie qu’il faut préserver ? L’amour apparaît donc être la face subjective de l’éthique de la co-présence au monde, car il enracine le vouloir préserver la nature dans l’essence même de l’homme en tant qu’elle est désir de persévérer dans l’être. C’est par désir que tout homme tend vers ce qu’il juge bon à sa conservation et fuit ce qu’il juge nuisible à son être. La responsabilité à l’égard de la nature n’est donc pas incompatible avec l’amour, au contraire elle en découle comme une conséquence logique du conatus.