Pauline CLOCHEC « Marx jeune hégélien - 1841-1846 »

Le jury sera composé de M. Emmanuel RENAULT (professeur à l’Université Paris X, directeur), Mme Catherine COLLIOT-THÉLÈNE (professeure à l’Université Rennes I), M. Franck FISCHBACH (professeur à l’Université de Strasbourg), M. Jean-François KERVÉGAN (professeur à l’Université Paris I Sorbonne), Mme Claire PAGÈS (maîtresse de conférence à l’Université François Rabelais de Tours), M. Norbert WASZEK, (professeur à l’Université Paris VIII, rapporteur) et M. Christian BERNER (professeur à l’Université Pari s X, rapporteur).

La soutenance sera suivie d’un pot convivial auquel vous êtes les bienvenu.e.s.

Résumé

L’appellation « jeune Marx » désigne les écrits marxiens, souvent publiés à titre posthume, allant de la Dissertation doctorale de 1841 tout au moins jusqu’aux articles des Annales franco-allemandes. Elle recouvre ainsi la période où Marx se réclame de la philosophie. Cette première période théorique a jusqu’à aujourd’hui fait l’objet d’une double et presque totale mise à l’écart théorique. D’une part, ces travaux de jeunesse ont été assimilés aux symptômes d’une formation intellectuelle encore incomplète, dont l’idéalisme aurait été dépassé par le matérialisme de la maturité. Cette approche était représentée en France d’une manière paradigmatique par Althusser. Elle a ce pendant aussi caractérisé, d’Engels à Cornu, presque toutes les traditions de lecture marxiste. Si des lectures symétriquement opposées, comme celle de Rubel, identifiant dans les théories du jeune Marx le fondement de son matérialisme à venir, ont inversé le diagnostic, elles n’en ont pas moins rejeté aussi l’approche immanente pour interroger les écrits du jeune Marx seulement dans leur intégration à l’évolution marxienne d’ensemble. D’autre part, c’est le contexte et l’intertexte théoriques de développement du jeune Marx, en l’occurrence sa participation au mouvement jeune hégélien, qui ont été mis de côté. Ils n’ont été mobilisés que négativement, servant à la mise en relief de l’originalité théorique et politique d e Marx. Or, cette période dite de jeunesse est pour Marx une période d’exploration théorique et politique qui demande à être interrogée pour elle-même. De plus, le travail théorique, voire parfois rédactionnel, de Marx dans cette période passe par la collaboration et la discussion avec des auteurs Jeunes hégéliens. On retient généralement de ces collaborations seulement celle avec Engels – dont on oublie qu’il fut un Jeune hégélien – en masquant celles qui la précédèrent ou furent simultanées, avec Bruno Bauer notamment jusqu’en 1842, avec Arnold Ruge à Paris, puis avec Moses Hess. Dans cette succession de collaborations et de polémiques, construire une théorie, pour le Marx de cette époque, implique toujours, d’une part, de se situer par rapport à Hegel, et d’autre part, de se situer par rapport aux autres Jeunes hégéliens. Notre projet consiste par conséquent, non à opposer Marx à l’ensemble des autres Jeunes hégéliens dont l’unanimité serait postulée, pour en valoriser l’originalité isolée, mais à retracer les évolutions théoriques de Marx en les situant à l’intérieur des débats qui constituent le jeune hégélianisme. Cette approche doit être appliquée, non seulement à la dimension philosophique des textes de « jeunesse » de Marx, mais aussi à ses travaux sur l’histoire, la religion, l’économie, la société et la politique. La « découverte » même de ces trois derniers domaines, généralement identifiée à un congé donné par Marx à la philosophie et à l’idéalisme qu’il laisserait aux Jeunes hégéliens, est à expliquer, du moins partiellement, selon une médiation jeune hégélienne. Comprendre le jeune Marx passe par une lecture génétique, contextuelle et intertextuelle de ses positions à l’intérieur du contexte jeune hégélien dans lequel les propositions de Marx prennent alors leur sens.