Valeurs de l’empreinte
Organisation : Emmanuel BOLDRINI, Léa DEDOLA et Bastien MOUCHET
Quand elle désigne l’impression d’une forme sur une surface, l’empreinte n’est qu’un procédé technique parmi d’autres. Mais sitôt qu’elle est perçue comme le témoin privilégié du passage d’un corps sur un autre, ou comme la preuve de la présence passée d’un objet ou d’un être absent, alors l’empreinte acquiert une valeur et devient objet de polémiques.
Ainsi, il y a des empreintes que nous aimons (re)découvrir et contempler : les géoglyphes, les empreintes positives ou négatives d’une main sur la surface d’un mur de grotte, l’empreinte d’un dinosaure enfermée par la roche, ou encore les empreintes des instantanés photographiques et de la durée cinématographique.
À l’inverse, il existe des empreintes que nous percevons avec angoisse, parfois avec regret, et dont nous questionnons la véracité du message, de l’identité, du renseignement, ou la conséquence de l’information. Par exemple, l’empreinte carbone, plus largement l’empreinte écologique, ou l’empreinte numérique nous invitent à penser l’héritage que nous laissons. Si ces empreintes sont au cœur de tant de revendications et qu’elles feront probablement l’objet des grandes manifestations et révolutions des prochains siècles, c’est peut-être à cause de leur caractère persistant, du fait qu’elles peuvent être monétisées aux dépens des utilisateur.ices, ou parce qu’elles sont la marque d’un rapport socialement désapprouvé de l’humain à la nature.
Par conséquent, depuis la constitution de la préhistoire en discipline scientifique au cours du XIXe siècle, jusqu’aux déploiements les plus récents des capacités des usines et des technologies, les valeurs morales, éthiques, ou déontologiques de l’empreinte n’ont jamais cessé d’évoluer. Quelles sont les répercussions intellectuelles, artistiques et littéraires de ces jugements ? Une telle problématique implique que, dans ce colloque, nous n’observions pas des métamorphoses strictement esthétiques, bien qu’il faille s’appuyer sur une poétique de l’empreinte qui passe par des sublimations ou des détournements (cf. la série sur les hydropithèques de Joan Fontcuberta). Il sera surtout question d’interroger la façon dont les artistes et les écrivains investissent les enjeux politiques posés par l’approche scientifique de l’empreinte.
Force est de constater que ces enjeux s’articulent souvent autour de récits rétrospectifs ou bien prospectifs. Autrement dit, l’empreinte a tendance à susciter deux types de fictions anthropologiques : une première relative à nos origines (d’où vient la trace ?) et une seconde relative à notre avenir (comment la trace sera-t-elle reçue ?). Bien sûr, chaque posture sert principalement à interroger le temps présent. Toutefois, cette distinction rend le sujet ambivalent : prendre l’empreinte comme objet, est-ce un geste d’arrière-garde ou d’avant-garde ? Cela revient-il à s’inscrire dans un héritage ou à le renier ? C’est en gardant à l’esprit cette double postulation qu’il peut être fécond d’interroger des œuvres très diverses ou d’en produire de nouvelles. Une place spécifique reste néanmoins accordée à la préhistoire et aux dispositifs numériques, parce qu’ils schématisent efficacement ce rapport ambivalent de l’empreinte au passé et au futur. Lire la suite sur l’appel à télécharger
Calendrier :
Les propositions d’articles ou d’œuvres d’une quinzaine de lignes, accompagnées d’une notice bio-bibliographique (et/ou d’un visuel), devront être adressées au comité scientifique au plus tard le 16 septembre 2022.
Les auteurs et artistes seront informés de l’acceptation de leurs propositions le 25 novembre 2022.
Comité scientifique :
Emmanuel BOLDRINI
Léa DEDOLA
Bastien MOUCHET
Comité d’exposition :
Cosmosia (Julien LOMET, Maëlys JUSSEAUX, Piers BISHOP, Nataliya VELYKANOVA, Léa DEDOLA)
Soutenu par les laboratoires IHRIM et Passages Arts & Littératures (XX-XXI) et l’association Têtes Chercheuses.