La Fabrique du XVIe siècle au temps des Lumières

Voir la publication des actes du colloque.
Ce colloque international s’inscrit dans la continuité de celui organisé l’année passée par l’IHRIM. 

Comité d’organisation :
Myrtille Méricam-Bourdet, université Lyon 2
Catherine Volpilhac, ENS de Lyon

Si les continuités et les ruptures entre les XVIIe et XVIIIe siècles ont depuis longtemps fait l’objet d’un questionnement, on souhaite dans ce colloque interroger en amont ces phénomènes et observer comment le XVIIIe siècle constitue le XVIe en objet de pensée sur lequel il prend appui, tant pour s’en distinguer que pour s’inscrire dans son prolongement, ou bien encore pour y trouver matière à (re)fondation de ses pratiques et de ses concepts. C’est un moyen privilégié d’aborder la constitution de la modernité en pensant l’histoire des idées en termes de ruptures (par rapport au XVIe comme au XVIIe) et de retours sur des modèles antérieurs : modèles ambivalents qui peuvent valoir autant comme facteurs de différenciation que comme fondements revendiqués comme tels.
De la « Renaissance » aux « Lumières », le passage paraît aller de soi, et nombreux sont certainement les phénomènes de résonance et d’identification par lesquels le siècle des Lumières trouve dans celle-ci un précédent, voire un modèle. Le concept de « Renaissance » est néanmoins postérieur au XVIIIe siècle ; c’est pourquoi il nous apparaît nécessaire d’envisager la façon dont le XVIe siècle se trouve compris, aussi bien à travers ses figures majeures – ou considérées comme telles –, ses œuvres, ses genres, ses problématiques politiques et religieuses, son esthétique ou encore ses savoirs, que dans son identité éventuelle de « siècle » et la périodisation qui en découle. Au-delà des études de réception, nécessaires mais non suffisantes, c’est donc plus largement la postérité intellectuelle du siècle, sous toutes ses formes, qui sera envisagée, ainsi que la constitution même de la notion de « renaissance » – ou son absence. Le XVIe siècle, où l’on parle encore le « vieux gaulois », est-il la fin d’un Moyen Âge délibérément construit comme le temps de l’obscurité, ou l’amorce d’une époque de lumière ? Avant Descartes et Malherbe, avant l’avènement du goût et de la méthode, est-on vraiment entré dans l’ère moderne ? Ce XVIe siècle dans lequel le XVIIIe se reconnaît pour mieux s’y opposer, qu’a-t-il à apprendre aux hommes des Lumières ?
Après une journée d’étude (avril 2015 ; actes à paraître dans la Revue française d’histoire du livre, 2016) qui a traité de la manière dont sont édités au XVIIIe siècle plusieurs textes importants du XVIe (Montaigne, la Pléiade, Marot, Louise Labé, récits de voyage, textes agronomiques, traductions de More, Agrippa de Nettesheim), ce colloque abordera, de manière large, l’histoire des sciences et des savoirs, de ses héros et de ses martyrs, telle que le XVIIIe siècle trouve à la constituer et à s’y reconnaître depuis le XVIe. Mais l’Encyclopédie, pour ne citer qu’elle, hérite de bien d’autres savoirs qui, de l’anatomie au droit, en passant par l’étude de la langue et de la lexicographie, en font l’un des multiples lieux où se « fabrique » le XVIe siècle.
On réfléchira également à la pensée philosophique dont hérite le temps des Lumières, tant dans ce qui fonde le courant sceptique ou certaines hétérodoxies, que dans ce qui permet de penser les rapports du politique et du religieux. Le traumatisme du schisme et des guerres de religion, dont le souvenir est revivifié par la Bulle Unigenitus, permet-il de réfléchir sereinement à la place de la religion dans l’État ? La notion même de « naïveté », si facilement attribuée au XVIe siècle, ne se redéfinit-elle pas à la lumière des illustres exemples d’Amyot et de Montaigne ?

PROGRAMME

Mardi 11 octobre

9h00 - Introduction

Aborder le XVIe siècle : Le livre et la langue

  • 9h30 Martine FURNO (IHRIM) : Michel Maittaire et l’imprimerie des Estienne : la fabrique des héros ?
  • 10h00 Maxime GEORGES METRAUX (Université Paris 4) : Conception et connaissance de l’art du XVIe siècle dans la production littéraire de Jean-Michel Papillon (1698-1776)
  • 11h00 Livia CASTELLI (Université de Rome) : Les éditions du XVIe siècle dans le catalogue d’un libraire parisien de livres rares
  • 11h30 Olivia MADIN (Université d’Oxford) : “La beauté de l’ouvrage fait d’abord la réputation de l’Auteur” : L’édition des Œuvres de Rabelais de 1741
  • 12h00 Rafaël MANDRESSI (CNRS, centre Koyré) : « Les livres-laboratoire des images du corps : rééditer Vésale et Eustachi au XVIIIe siècle »

Apprendre à penser avec le XVIe siècle (1)

  • 14h30 Sarah CARVALLO (École centrale de Lyon) : « Les lumières anatomiques ». La relecture par Tarin de l’anatomie du XVIe siècle
  • 15h00 Antony McKENNA (IHRIM, Université de Saint-Étienne) : L’article « Charron » dans le Dictionnaire de Bayle
  • 15h30 Brian MUNOZ (IHRIM, ENS de Lyon) : Giordano Bruno dans le Dictionnaire historique et critique de Pierre Bayle
  • 16h30 Lorenzo BIANCHI (Université L’Orientale, Naples) : Bayle et la philosophie italienne de la Renaissance
  • 17h00 Michel JOURDE (IHRIM, ENS de Lyon) : « “De tout temps les hommes ont aimé la nouveauté” : les “innovations” du XVIe siècle jugées par le XVIIIe siècle »

Mercredi 12 octobre

Apprendre à penser avec le XVIe siècle (2)

  • 9h00 Neil KENNY (Université d’Oxford) : Que devient au XVIIIe siècle le statut social de Montaigne ?
  • 9h30 Bernard GITTLER (Université Paris 1) : Le Montaigne de Rousseau, un critique politique : les références aux Essais dans le premier Discours
  • 10h00 Laurence MACE (Université de Rouen) : Montaigne et l’écriture de l’intimité : fonder une tradition ?
  • 11h00 Dominique COUZINET (Université Paris 1) : La vision de la philosophie du XVIe siècle dans les histoires de la philosophie au temps des Lumières : le cas de Ramus et du ramisme.
  • 11h30 Tristan VIGLIANO (Université Lyon 2) : Sur un Dialogue des morts : Nicolas de Gueudeville lecteur d’Henri Corneille Agrippa
  • 14h30 Flora CHAMPY (ENS de Lyon et Rutgers University) : La médiation des auteurs politiques du XVIe siècle dans les références à l’Antiquité chez Rousseau
  • 15h00 Josiane GUITARD-MOREL (ESPE Clermont-Ferrand) : Comment la pédagogie humaniste a-t-elle nourri la réflexion éducative de Jean-Jacques Rousseau ?
  • 15h30 Eszter KOVACS (Académie hongroise des sciences) : Principes de politique des souverains. La réflexion de Diderot sur la raison d’État.
  • 16h30 Grégoire HOLTZ (Université de Toronto) : La Vie d’Apollonius de Tyane du XVIe au XVIIIe siècle : fortunes d’un païen sulfureux
  • 17h00 Aliènor BERTRAND (CNRS, IHRIM) : Analyse et travestissements de la première expérience coloniale au siècle des Lumières

Jeudi 13 octobre

Modèles : de la référence à la réécriture

  • 9h Ioana GALLERON (Université de Bretagne-Sud) : Le théâtre humaniste en palimpseste au XVIIIe siècle
  • 9h30 Emmanuelle SEMPERE (Université de Strasbourg) : L’actualité paradoxale du Roland furieux en 1763 : le badinage au secours de l’épopée dans Ollivier de Jacques Cazotte
  • 10h David MOUCAUD (Université Paris 3) : Tout contre le vers classique, la rencontre des badins
  • 11h Sergueï KARP (Académie des sciences de Russie) : Diderot déguisé en Rabelais
  • 11h30 Morgane MUSCAT (ENS de Lyon et Maison française d’Oxford) : Voltaire et Diderot pantagruélistes

Perspectives européennes

  • 14h00 Manuela BRAGAGNOLO (Max Planck Institute, Francfort) : L’Italie savante et les manuscrits du XVIe siècle. Droit, politique et religion chez Lodovico Antonio Muratori
  • 14h30 Pierre BRUNEL (Université Lyon 2) : Friedrich Heinrich Jacobi (1743-1819) et le XVIe siècle
  • 15h30 Charlotte MOREL (CNRS, IHRIM) : Lessing et les hérétiques du XVIe siècle : de l’anti-trinitarisme à la réflexion sur le déisme
  • 16h00 Sara VITACCA (ENS de Lyon) : L’image de la Renaissance dans la littérature artistique entre France et Italie au tournant du XVIIIe siècle

http://renlum.hypotheses.org/

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