Benjamin Constant : l’esprit d’une œuvre

Le colloque international sera consacré à l’esprit qui anime la pensée de Benjamin Constant. Son œuvre politique (Principes de politique) et religieuse (De la Religion) a posé un jalon essentiel dans la réflexion sur les fondements de la société démocratique et de la vie parlementaire en France comme dans le monde ; elle constitue aujourd’hui encore une référence incontournable. De même, ses récits à la première personne, dont Adolphe, roman qui a connu de nombreuses traductions et adaptations à travers le monde, sont des œuvres pionnières dans le genre de l’écriture personnelle.
L’œuvre de Constant est marquée au sceau d’une pensée vive, d’un art de l’argumentation, appuyé sur un style précis, tranchant, maniant le paradoxe et l’épigramme. Ce colloque, qui réunira des intervenants de France et de l’étranger, abordera ainsi ce qui constitue l’esprit de cette pensée : sa manière, son style, son art du récit, de l’argumentation, du pamphlet, bref sa « parole singulière ».

Organisé par :
Éric BORDAS (ENS de Lyon / IHRIM) et Jean-Marie ROULIN (UJM Saint-Étienne / IHRIM),
à l’occasion du 250e anniversaire de la naissance de Benjamin Constant.

L’œuvre politique (Principes de politique) et religieuse (De la Religion) de Benjamin Constant a posé un jalon essentiel dans la réflexion sur les fondements de la société démocratique et de la vie parlementaire en France comme dans le monde ; elle constitue aujourd’hui encore une référence incontournable. Mettant an pratique sa pensée théorique, il a été un homme politique capital dans les dernières années de la Révolution et sous la Restauration, intervenant dans des essais ou des articles percutants. Littérairement, Adolphe s’est imposé comme une œuvre majeure de la période ; traduit dans de nombreuses langues, ce récit incisif a marqué plusieurs romans, de La Muse du département de Balzac à Ni toi, ni moi de Camille Laurens, en passant par Guy de Pourtalès ou Jacques Chessex ; il a aussi inspiré la bande dessinée (Pascal Croci) ou le cinéma (Benoît Jacquot). Ses Journaux intimes lui ont valu d’être considéré comme « l’inventeur » du journal intime moderne. Fin connaisseur de la littérature allemande, ayant séjourné notamment dans le Weimar de Goethe et de Schiller, il a, aux côtés de G. de Staël, quoique de manière moins systématique, contribué à penser la littérature de la société post-révolutionaire en France. Épistolier talentueux, il a entretenu une correspondance continue, rendue aujourd’hui disponible grâce au remarquable travail éditorial accompli par l’équipe en charge de l’édition de ses œuvres complètes. Œuvre immense – comme en témoigne la remarquable édition de ses œuvres complètes, actuellement en cours – et difficile à cerner par son caractère polymorphe.
À l’occasion du 250e anniversaire de sa naissance, nous avons souhaité consacrer un colloque qui se tiendra à l’ENS de Lyon
jeudi 23 et vendredi 24 novembre 2017. Il sera consacré à l’esprit qui anime cette pensée pénétrante et fertile en paradoxes.
L’œuvre de Constant est marquée au sceau d’une pensée vive, d’un art de l’argumentation, appuyé sur un style précis, tranchant, maniant le paradoxe et l’épigramme. Cette forme d’esprit, les contemporains l’avaient relevée dans la conversation et la personne même de Constant, comme le montre cette note de Chênedollé citée par Sainte-Beuve : « Rien de plus piquant que sa conversation ; toujours en état d’épigrammes, il traitait les plus hautes questions de politique avec une logique claire, serrée, pressante, où le sarcasme était toujours caché au fond du raisonnement ; et quand avec une perfide et admirable adresse, il avait conduit son adversaire dans la piège qu’il lui avait tendu, il le laissait là battu et terrassé sous le coup d’une épigramme dont on ne se relevait pas. Nul ne s’entendait mieux à rompre les chiens, et à jeter de l’inattendu dans la conversation. »
Dans l’ensemble de cette œuvre – des essais politiques (De l’esprit de conquête et de l’usurpation) à la critique littéraire, de son théâtre (Wallstein) à ses récits (Cécile) ou à son autobiographie inachevée (Ma vie), de ses pamphlets à sa correspondance –, il s’agira d’aborder ce qui constitue l’esprit de cette pensée : sa manière, son style, son art du récit, de l’argumentation, du pamphlet, bref sa « parole singulière ». On élargira la perspective à la vision de la littérature : que doit être l’esprit du roman ou du théâtre dans la société post-révolutionnaire ? On s’intéressera également à ce qui constitue le développement de sa pensée, par exemple de la tension entre la démarche historique et l’approche anthropologique, comme le montrent les hésitations sur le plan de De la Religion.
On pourra aborder, sans que cette liste prétende à l’exhaustivité :
- Style, ironie, épigramme ;
- Humour et sarcasme ;
- Introspection et observation ;
- Vision de la littérature, critique littéraire ;
- La ponctuation comme art de penser ;
- Les concepts de la pensée ;
- Démarche historique, approche anthropologique ;
- La traduction.


L’année 2017 marque le 250e anniversaire de Benjamin Constant, né à Lausanne le 25 octobre 1767, anniversaire inscrit aux « Commémorations nationales ». Dans le cadre des recherches sur la littérature et les arts entre 1780 et 1830 qui sont un de ses domaines d’expertise, l’IHRIM rendra hommage à cet écrivain par trois événements :

  • une nouvelle édition de ses journaux intimes
  • une session dans un congrès aux États-Unis
  • un colloque international, le seul qui se tiendra en France à cette occasion.

La Nouvelle édition des Journaux intimes de Benjamin Constant par Jean-Marie Roulin, chez Gallimard dans le collection « Folio classique » paraîtra le 5 octobre 2017.

  • Longtemps restés à l’état de manuscrit, les Journaux intimes de Benjamin Constant ont dès leur première publication été reconnus comme un chef-d’œuvre de l’écriture diaristique. Les spécialistes du journal et des écritures intimes le considèrent comme le premier journal personnel moderne. Jean-Marie Roulin propose une nouvelle édition de ces journaux, avec un texte revu sur les manuscrits (conservés à Lausanne) et un commentaire qui tient compte des derniers travaux sur Constant et le genre du journal.