Hélène LANNIER « Benoît Court, un juriste humaniste et ses livres »
Dirigée par Michèle CLÉMENT et co-dirigée par Raphaële MOUREN
Le jury sera composé de :
Mme Géraldine CAZALS, Professeure des Universités, Université de Rouen
Mme Michèle CLÉMENT, Professeure des Universités, Université Lumière Lyon 2 (directrice)
M. Stéphan GEONGET, Professeur des Universités, Université de Tours
Mme Valérie HAYAERT, Chercheuse au Käte Hamburger Centre Kolleg « Recht als Kultur » de l’Université de Bonn
Mme Raphaële MOUREN, Reader, University of London (co-directrice)
M. Tristan VIGLIANO, Maître de Conférence-Habilité à diriger des recherches, Université Lumière Lyon 2
Dans la première moitié du XVIe siècle, la ville de Lyon est marquée par un fort dynamisme culturel qu’elle doit à un milieu intellectuel effervescent animé par des auteurs de passage dans la ville ou lyonnais d’origine. En rassemblant et analysant les diverses traces laissées par les activités intellectuelles du juriste originaire des monts du Lyonnais Benoît Court (av. 1495-ca. 1559), la thèse vise notamment à documenter les activités de ce milieu par une perspective singulière et inédite. La reconstitution de la biographie et du réseau de sociabilité du juriste a précisé sa place au sein des cercles érudits et, notamment, dans le Sodalitium lugdunense, le réseau humaniste lyonnais, des années 1530. Ses liens avec des auteurs ayant fait les belles heures de l’humanisme lyonnais tels que Symphorien Champier, Étienne Dolet ou les poètes néo-latins ont ainsi été mis en évidence. Quelques traces de son activité – achat de livres et publication de ses propres œuvres bien sûr mais aussi conseil à la publication – dans les ateliers d’imprimerie de Sébastien Gryphe, des frères Frellon et de Jean de Tournes ont en outre été rassemblées.
Tout en fréquentant les cénacles érudits et les ateliers d’imprimerie et sans doute encouragé par l’émulation intellectuelle qui y régnait, Benoît Court a publié trois œuvres à Lyon en l’espace d’une trentaine d’années. En sa qualité de commentaire juridique, la première de celles-ci témoigne bien sûr des compétences en droit de son auteur mais aussi de son positionnement au cœur du renouvellement herméneutique entraîné par l’application des méthodes humanistes au champ juridique. Il s’agit de commentaires destinés aux étudiants en droit ou aux praticiens qui représentent aussi un exemple éloquent de droit lettré tel que l’humanisme juridique l’a prôné. La grande culture et les vastes connaissances que Benoît Court investit dans leur écriture correspondent alors à l’idéal du « juriste parfait », perfectus iurisconsultus, qui se développe à la Renaissance. Mais encore, l’œuvre de Court se distingue par l’invention littéraire originale qu’il y déploie. Il détourne en effet la forme classique du commentaire juridique en lui appliquant l’esthétique paradoxale du serio ludere héritée de l’Antiquité. En jouant avec sérieux, le juriste fait alors montre d’une grande inventivité et propose une forme de commentaire inédite.
La physionomie de Benoît Court en « juriste parfait » est complétée par la reconstitution de sa bibliothèque personnelle. Le travail d’enquête qui a permis de rassembler les données bibliographiques et matérielles de deux-cent-deux titres répartis dans quatre-vingt-cinq volumes a mis au jour une collection encyclopédique qui devait figurer parmi les plus importantes bibliothèques lyonnaises privées de l’époque. En plus de préciser les intérêts intellectuels de son propriétaire, celle-ci s’est révélée être une source de documentation précieuse pour la connaissance des milieux lyonnais de l’imprimerie et de la reliure ainsi que pour l’appréhension de la circulation des livres en Europe.