Marceau LEVIN « La fabrique des hommes du jour : les biographies contemporaines en France (1850-1870) »
Directeur de thèse : Olivier BARA et Anthony GLINOER
Le jury sera composé de :
Paul Aron, université libre de Bruxelles (Belgique)
Adeline Wrona, Sorbonne université
Anthony Glinoer, Université de Sherbrooke (Canada)
Josée Vincent, Université de Sherbrooke (Canada)
Marie-Eve Therenty, Université Paul-Valéry Montpellier 3
RÉSUMÉ
Durant les décennies 1850 et 1860 a lieu une multiplication sans précédent de récits de vie portant sur des vivants : les biographies contemporaines. Qu’il s’agisse de notices de dictionnaire, de petites brochures vendues quelques centimes ou d’articles de journaux, ces textes biographiques répondent à une curiosité nouvelle pour les hommes et les femmes « du jour », issus en grande partie du monde culturel. En vingt ans paraissent en moyenne trois galeries biographiques par mois. Ces textes relèvent d’une production qu’on pourrait qualifier d’industrielle : vite écrits et vite lus, ils sont le plus souvent illustrés, périodiques et bon marché. À l’avant-poste d’une économie de la célébrité en train de se construire, ils ont le gain financier pour alpha et oméga. S’intéresser à l’élaboration des biographies contemporaines lève le voile sur la multitude de pratiques réticulaires (échanges de bons procédés, transactions diverses) dont elles procèdent. Souvent écrits par les intéressés ou sous leur dictée, ces textes participent à la commercialisation de la célébrité et préfigurent l’essor de la publicité. Leur étude met au jour tout un travail de gestion de la notoriété qui est le dénominateur commun des acteurs du monde culturel autant que des hommes politiques ou des grands médecins et avocats. Dissimulant pudiquement ces coulisses de la célébrité, le XIXe siècle a élaboré un imaginaire du biographe calomniateur et aigri qui s’en prend à des vedettes victimes – il faut néanmoins reconnaître que les nombreuses péripéties judiciaires d’Eugène de Mirecourt, auteur d’une série biographique intitulée Les Contemporains, ont joué un rôle dans cette cristallisation négative. Qu’on en fasse les ancêtres des paparazzi ou ceux des spin doctors, les biographes de contemporains sont au cœur de la construction des « figures publiques » (Antoine Lilti) au cours du XIXe siècle.