Marjorie BROUSSIN « Images et imaginaires scolaires de la littérature française du XVIe siècle : constitution, modélisation et transmission d’un corpus canonique de la Renaissance (1880-2011) »
Le jury est composé de :
Michèle CLÉMENT, professeure des universités, université Lyon 2, directrice
Martine JEY, professeure des universités, université Paris-Sorbonne
Jean-Charles MONFERRAN, professeur des universités, université Paris-Sorbonne
Jean VIGNES, professeur des universités, université Paris-Diderot
Stéphane ZEKIAN, chargé de recherche, CNRS
Résumé
De l’Histoire de la littérature française de Gustave Lanson, dont la première édition date de 1894, aux manuels de littérature pour les classes de lycée publiés en 2011, une même représentation de la Renaissance et de sa littérature parcourt les ouvrages scolaires et peint la période sous les traits d’un « beau XVIe siècle », moment de réveil des arts, des lettres et des sciences. Or, si cette image s’impose comme une évidence, à travers les mécanismes itératifs de la transmission, elle s’avère en réalité une construction dont l’évolution historique souligne la dimension fictionnelle de la notion même de siècle littéraire.
Liée aux mécanismes propres à l’histoire littéraire, qui découpe et met en récit la littérature selon des visées institutionnelles, l’image scolaire de la littérature du XVIe siècle s’avère en effet l’aboutissement de phénomènes parallèles de sélection, de modélisation et de hiérarchisation des auteurs et des textes. La mise en œuvre de ces différents mécanismes se traduit d’une part par la constitution et la diffusion d’un corpus canonique de la littérature du XVIe siècle dans les ouvrages scolaires, et d’autre par la création dans le discours scolaire de figures classiques pour les écrivains et poètes du siècle. La conjonction de ces processus détermine dès lors un ensemble canonique hiérarchisé et un discours unifié, une doxa, qui servent de fondement à la représentation scolaire du siècle. Ce sont ces deux aspects constitutifs de l’image canonique de la littérature du XVIe siècle, la constitution du canon d’une part, la pérennité du discours scolaire d’autre part, qui sont analysés ici au moyen d’un large corpus d’ouvrages scolaires, étalé sur plus d’un siècle. Ce faisant, seront mis au jour les phénomènes de stabilisation et d’évolution de la doxa et du canon, en regard des mutations historiques et institutionnelles.
La représentation canonique du siècle, de même que le canon des auteurs et des œuvres, se construit en effet en lien avec les impératifs institutionnels liés à la transmission de la littérature. Déterminant pourquoi et comment doit être transmise la littérature nationale, ces impératifs soulignent que les règles de sélection et de hiérarchisation des œuvres dans le canon sont édictées en fonction de visées politiques, sociales et idéologiques. L’étude de l’image scolaire de la littérature du XVIe siècle suppose dès lors d’interroger les valeurs et les représentations qui informent le discours des manuels et déterminent les formes prises par les représentations canoniques du siècle, afin de dégager les enjeux de l’imaginaire scolaire qui sous-tend cette vision.
Mots-clés :
Renaissance, histoire littéraire, siècle littéraire, classicisation, représentations canoniques, valeurs de la littérature